DES OUVRAGES… SUR DES CONFLITS PASSÉS, PRÉSENTS OU MÊME À VENIR

@ Charly

À l’heure où les conflits mondiaux, dont certains d’une ampleur inouïe, alimentent la une de tous les médias de la planète, nombre d’ouvrages traitant de ces sujets brûlants sortent en librairies. Sans oublier que diverses maisons d’édition n’hésitent pas à donner place à des titres parlant de guerres plus anciennes, et suite auxquelles on avait dit: ‘Plus jamais ça!’ Et pourtant, depuis…

L’AFFRONTEMENT ISRAÉLO-PALESTINIEN
‘Deux peuples pour un État?’, de Shlomo Sand chez Seuil. Ce nouvel ouvrage de Shlomo Sand, historien israélien, professeur émérite à l’université de Tel-Aviv, et auteur de nombreux livres dont certains ont suscité de vifs débats, a été écrit avant les événements de 7 octobre 2023. Ce qui n’empêche qu’il se veut une relecture de l’histoire du sionisme.
LA CRÉATION D’UN ÉTAT BINATIONAL OÙ ISRAÉLIENS ET PALESTINIENS seraient citoyens d’un même État a jadis été l’aspiration de nombreux intellectuels juifs critiques, issus de mouvements de gauche comme de droite. Les prises de position en faveur du binationalisme d’Ahad Haam dès la fin du XIXe siècle, à Léon Magnes, en passant par Hannah Arendt et beaucoup d’autres pour qui le désir de créer un État juif sur une terre peuplée en majorité par des Arabes entraînerait un conflit violent et insoluble, se sont révélées tout à fait exactes.
AVEC L’ARRIVÉE AUX AFFAIRES DE L’EXTRÊME DROITE en Israël, les massacres perpétrés par le Hamas et les bombardements de la bande de Gaza, la question de l’État binational est devenue une urgence pour toute la région. Lui tourner le dos n’y changera rien. Car le binationalisme ne révèle pas seulement du vœu pieux, mais aussi de la réalité présente. 7,5 millions d’Israéliens-juifs dominent, suite à une politique d’expulsion, de déplacement, de répression et d’enfermement, un peuple palestinien-arabe de 7,5 millions de personnes, dont une grande partie est privée de droits civiques et des libertés politiques élémentaires. Il est bien évident qu’une telle situation ne pourra pas durer éternellement.
SI POUR LA MAJORITÉ DES PERSONNES VIVANT CE CONFLIT de l’extérieur il est devenu impossible d’imaginer qu’au paroxysme des violences actuelles, ces deux peuples ennemis puissent un jour cohabiter au sein d’un État binational, pour l’auteur israélien de cet ouvrage il n’existe pourtant pas d’autre solution. Ce qu’il tente de démontrer dans ce livre et qu’il espère malgré tout.

‘7 octobre 2023 Israël Gaza’, de Benoît Christal et Gallagher Fenwick aux éditions du Rocher. Écrire sur le Proche-Orient depuis le 7 octobre 2023 revient à plonger dans un abîme très sombre, à avancer dans l’obscurité des traumatismes et de l’actualité mouvante. Pour les auteurs, grands reporters et longtemps correspondants à Jérusalem, ce devoir s’est imposé.
RECUEILLIR LA PAROLE DES DEUX CAMPS: survivants, proches d’otages, habitants de Gaza… Ils sont médecin, journaliste, photographe, soldat, diplomate, enfant de déportés, personnalité politique, ex-ambassadeur, négociateur… Chacun d’eux raconte son 7 octobre 2023, son Israël, sa Palestine. Et le lecteur d’écouter leurs émotions, leurs idées, leurs analyses. ‘Dé-sidérer’, en nommant les crimes et les douleurs, sans pour autant passer sous silence la colère, mais aussi la soif de paix.
LA PLUPART DU TEMPS, CE SONT DEUX PEUPLES qui s’affrontent autant qu’ils s’ignorent, séparés par un immense fossé, et cela alors que leurs récits se font fatalement écho. C’est dans cette non-rencontre que se joue l’affrontement des tragédies et des souffrances.
CE LIVRE, QUI EST L’AFFRONTEMENT DE CES TRAGÉDIES, ne sert ni à convaincre, ni à accuser, mais à consigner et témoigner pour éviter que ces drames ne sombrent dans l’oubli, qu’ils soient déformés, ou effacés par ceux qui les nieront. Quant au lecteur, il aura sous les yeux nombre de clés pour ouvrir nombre de portes appartenant aux deux parties en conflit, et se forger enfin, sa propre opinion.

POUTINE, LES RUSSES ET LA GUERRE
‘Les Russes veulent-ils la guerre?’, de Vera Grantseva aux éditions du Cerf. Entre 2008 et 2016, l’auteure travaillait comme experte pour les relations internationales à la mairie de Saint-Pétersbourg. Par la suite, elle devient professeure associée de l’École des hautes études en sciences économiques en Russie. Depuis 2020, elle est enseignante à Sciences Po Paris et chroniqueuse sur LCI. Dans son livre, elle se pose la question quant au déni apparent du peuple russe face aux atrocités perpétrées en Ukraine. Ensuite, elle nous explique espérer un sursaut politique venu de l’intérieur même de son pays d’origine.
‘LES RUSSES VEULENT-ILS LA GUERRE?’, demandait en 1961 le poète russe Evgueni Evtouchenko. Aujourd’hui, la question est toujours bel et bien d’actualité. Que veut réellement le peuple russe? Soutient-il totalement la guerre que Poutine a déclenchée en Ukraine ou cherche-t-il la paix avec ses voisins en européens? Mais, surtout: pourra-t-il un jour prendre son destin en main et apporter des changements politiques en Russie? Des questions auxquelles l’auteure, qui a dû quitter son pays, tente d’apporter des réponses et d’entrevoir un avenir. Elle entend démontrer aussi, qu’en dépit des apparences, le peuple russe n’a pas d’esprit servile et que les chances pour que Russes et Européens finissent par s’entendre, existent bel et bien.
IL EST TOUTEFOIS BON DE REMARQUER que depuis l’invasion de l’Ukraine en février 2022, la société russe présente une énigme. Les sondages officiels montrent que plus l’armée russe commet des crimes en Ukraine, plus les Russes ordinaires soutiennent Poutine. Pourtant, et en même temps, les autorités n’arrivent pas à recruter les citoyens afin qu’ils prouvent, par des actes, leur soutien à celui qui se prend pour le nouveau tsar d’une Russie qu’il veut toujours de plus en plus grande.
DÈS LORS, LE GOUVERNEMENT N’A PAS D’AUTRES CHOIX que de forcer les hommes à aller combattre dans le pays voisin, ces ‘nazis’ qui lui résistent. La réalité montrant également que dans les cafés, les théâtres et les cinémas de Moscou, Saint-Pétersbourg et autres grandes villes, la réalité de la guerre n’existe tout simplement pas. Les Russes continuant à mener une vie ordinaire, à fermer les yeux sur les bombardements des villes ukrainiennes et à faire semblant que l’invasion des terres de leur voisin ne les concerne pas. Et l’auteure d’expliquer que le régime répressif et la propagande massive jouent un rôle important dans la zombification de la population. À lire absolument pour mieux comprendre.

LA GUERRE AUJOURD’HUI
‘La guerre au XXIe siècle, le retour de la bataille’, onze auteurs sous la direction de Thibault Fouillet aux éditions du Rocher. Alors que le conflit en Ukraine a ramené de manière brutale le ‘phénomène guerre’ en Europe, et ce selon des modalités qui n’avaient plus été vues chez nous depuis 1945, voilà que, du coup, il replace aux côtés des dimensions stratégiques et géopolitiques la bataille dans toute sa complexité et sa diversité.
CET OUVRAGE, QUI MOBILISE POUR LA PREMIÈRE FOIS dans un même volume des auteurs pointés parmi les plus grands experts français de la pensée tactique contemporaine, se présente comme une étude incisive et pluridisciplinaire des conflits actuels, mais également sur l’avenir de nos sociétés. Il offre aussi un éclairage théorique sur les évolutions de la bataille et les problématiques contemporaines de la tactique. Ce faisant, il caractérise son anatomie d’aujourd’hui, et exploite les leçons des engagements de ces vingt dernières années.
TOUTEFOIS, IL RESTE DIFFICILE D’Y VOIR CLAIR entre les armements, les mouvements de troupes, les divers théâtres d’opérations, l’évolution des doctrines, etc.  De ce fait, il peut être malaisé de comprendre pourquoi le succès d’un jour peut être l’échec du lendemain. Dans ce contexte, il semble indispensable de revenir à l’étude de la tactique, cette science du combat qui explique les dynamiques de la bataille et les problématiques des opérations modernes. Mieux comprendre la bataille d’aujourd’hui, c’est anticiper celle de demain, et par ce biais, appréhender la guerre au XXIe siècle. Un ouvrage à lire par tous ceux et celles qui aiment la stratégie, mais qui aussi comprendre pourquoi la guerre, dans toutes ses horreurs, est de bel et bien de retour à 3 heures d’avion de Bruxelles.

‘Vie et mort de Maxime Blasco, un soldat d’élite’ de Dorothée Olliéric chez Litos. Journaliste et grand reporter à France TV, Dorothée Olliéric a couvert depuis plus de vingt ans, tous les conflits: Bosnie, République centrafricaine, Mali, Afghanistan, Ukraine… Son véritable credo: raconter au grand public la guerre à hauteur d’hommes et de femmes. Dès lors, qui mieux qu’elle, pouvait raconter et donner à lire le destin de ce soldat exceptionnel qui était au cœur de son documentaire: ‘Nuit d’enfer’.
MAXIME BLASCO A TROUVÉ LA MORT LE 24 SEPTEMBRE 2021. Cinquante-deuxième soldat français tué au combat contre les djihadistes du Mali, il avait 34 ans et s’était plusieurs fois illustré en opex, ou si vous préférez en engagement militaire hors des frontières. Il se voulait simple soldat servant son pays, et réfutait le qualificatif de héros.
DANS CE RÉCIT BOULEVERSANT, L’AUTEURE REVIENT sur la vie de ce tireur d’élite, ancien pâtissier ayant choisi l’armée, et plus particulièrement les chasseurs alpins. Grâce aux témoignages de ses compagnons d’armes, mais également de ses parents et de sa compagne, elle trace au plus près le portrait intime d’un homme engagé qu’elle avait pu rencontrer et interroger lorsque, en 2019, il avait sauvé sous le feu de l’ennemi, deux camarades après le crash de leur hélicoptère dans le désert du Sahel. Un récit auquel vous allez rester scotché tant il est empreint de pudeur, même face à l’horreur des combats.

‘Sa vie pour la mienne’, de Julie Grand chez Artège. Aujourd’hui, le terrorisme islamiste frappe partout en Europe. Dans ce récit-vérité, c’est le 23 mars 2018 dans le Super U de Trèbes, en France, dans le département de l’Aude, que l’horreur s’est produite. Ce jour-là, l’auteure est plongée au milieu d’un drame incroyable. Et pourtant, d’une mort assurée suite à un attentat islamiste perpétré là où elle travaille, elle va passer à la survie grâce au sacrifice d’Alain Beltrame, ce colonel de gendarmerie qui a pris sa place en temps qu’otage, et qui y laissera sa vie.
JUSQU’AUJOURD’HUI, JULIE GRAND, MÈRE D’UN ENFANT, avait décidé de garder le silence, fuyant de la sorte la presse et les médias. Jamais elle ne s’était exprimée sur ce qu’elle avait vécu ce jour fatidique lorsque le colonel Beltrame avait pris sa place en tant qu’otage. Si sa vie a été sauvée contre une autre, ce jour-là a pourtant commencé pour elle une lente et implacable descente aux enfers.
EN QUELQUES MOIS, JULIE VA VOIR S’ABATTRE SUR ELLE la dépression et sa longue procession de souffrances psychologiques, viendra aussi l’explosion de sa cellule familiale avant de devoir suivre l’inhumain parcours d’indemnisation des victimes du terrorisme. Récemment, elle a refait surface. Des rencontres l’ont conduite à retrouver la force de vivre et surtout d’expérimenter une nouvelle existence.
AVEC CET OUVRAGE-VÉRITÉ QUI VOUS PREND AUX TRIPES, Julie Grand nous offre un témoignage brut et sans la moindre fioriture. La vérité vraie écrite avec les mots qui sont les siens. C’est chargé d’émotions, car elle ne craint pas d’évoquer chacun de ses combats. Et Dieu sait s’ils furent nombreux. En fait, un parcours atypique et brutal, dans lequel ce valeureux gendarme inconnu d’elle demeure l’incontournable fil rouge.

RETOUR SUR LA SECONDE GUERRE MONDIAL
‘Histoire totale de la Seconde Guerre mondiale’, d’Olivier Wieviorka chez Perrin. Ce fort ouvrage de quelque 1068 pages, écrit par celui qui est unanimement reconnu comme étant le meilleur spécialiste francophone actuel du second conflit mondial, est en fait une œuvre magistrale, innovant tout d’abord par son approche globale qui la distingue largement de ses illustres et classiques devancières anglo-américaines axées uniquement sur la guerre proprement dite.
CE LIVRE EST NÉ D’UN CONSTAT PARADOXAL. C’est vrai que si les ouvrages se rapportant à la Seconde Guerre mondiale sont nombreux, dans la réalité il n’existe guère de grandes synthèses sur le sujet. Et d’autant plus de l’envergure de celle que propose Olivier Wieviorka. Fruit de dix années de travail, il aborde tous les fronts. L’Europe, évidemment, mais aussi l’Asie-Pacifique souvent négligée, en particulier la Chine, l’Afrique du Nord ou encore le Moyen-Orient.
IL S’INTÉRESSE ENSUITE À TOUS LES ACTEURS, Canadiens, Australiens, Indiens… et couvre tous les domaines: militaire et stratégique comme il se doit, mais aussi idéologique, économique, logistique, technologique, sans oublier pour autant l’histoire culturelle, sociale et mémorielle traitée en parent pauvre.
ENFIN, L’HISTORIEN RENOUVELLE LARGEMENT dans une démonstration aussi rigoureuse sur le fond que limpide dans la forme, la matière souvent un peu datée, en y intégrant tous les travaux essentiels publiés depuis une génération. Un ouvrage où vous apprendrez également où résidait la logique des acteurs et qui démontre à quel point ce conflit fut véritablement mondial et total. Un ouvrage à ne manquer sous aucun prétexte si l’histoire de la Seconde Guerre mondiale vous passionne. Pourquoi? Parce qu’il n’est semblable à aucun autre édité à ce jour.

39 – 45’, d’Ivor Matanle chez Glénat. Comme l’explique l’éditeur, cet ouvrage réalisé en partenariat avec l’Imperial War Museum de Londres a pour mission de raconter la Seconde Guerre mondiale par le truchement de textes, bien évidemment, mais également par le biais de 1500 photos, de cartes d’état-major, d’affiches, de documents, de lettres, de carnets et d’objets d’époque. Tout un programme!
REPRÉSENTÉ AVANT TOUT COMME UNE HORREUR sans précédent, le second conflit mondial a eu un impact immense sur la pensée contemporaine: la découverte du génocide juif disqualifiant la croyance dans le progrès, héritée des Lumières du XVIIIe siècle. Elle consacre aussi la fin de la prépondérance européenne, ainsi que la domination de l’URSS et des États-Unis sur le monde.
LORSQU’IL ÉCLATE LE 1er SEPTEMBRE 1939 à la suite de l’invasion de la Pologne par l’Allemagne nazie, le conflit va opposer, de 1939 à 1945, les puissances de l’Axe aux États démocratiques de l’Europe occidentale rejoints ensuite par la Chine, l’URSS et les États-Unis. Il s’achèvera par la défaite de l’Allemagne le 8 mai 1945 et celle du Japon, le 2 septembre 1945.
PUBLIÉ PLUS DE TROIS QUARTS DE SIÈCLE après la fin du conflit, cet ouvrage encyclopédique propose, de la manière la plus impartiale qu’il soit, une histoire militaire concise de cette Seconde Guerre mondiale. Il couvre aussi tous les éléments marquants du conflit dans l’ensemble des théâtres territoriaux. Outre des textes explicatifs plus que documentés, c’est sa richesse iconographique qui est à mettre en exergue.

‘La France sous l’Occupation’, de Guillaume Picon chez Glénat. L’histoire de la France sous l’Occupation est encore trop souvent perçue à travers le prisme déformant d’idées reçues. Cet ouvrage entend raconter la France des ‘années noires’, et ce au plus près de ce que le travail des historiens a permis d’en savoir aujourd’hui. De ce fait, il propose au lecteur un récit à la fois chronologique et thématique.
À CÔTÉ DES ÉVÉNEMENTS ET DE LEURS ACTEURS, une large place est accordée à des sujets concernant la vie quotidienne des Françaises et des Français, mais aussi à la défaite en 1940 et à la libération de 1944 à 1945. C’est ainsi que le lecteur pourra participer à l’exode des populations devant l’avancée des troupes allemandes, à l’installation de la ‘puissance occupante’, il surfera aussi sur la ligne de démarcation tout en étant confronté aux prisonniers de guerre, au monde du marché noir, aux rafles des juifs et aux réactions qu’elles suscitèrent au sein de la population française. Au-delà, on s’attardera encore à la déportation, à l’organisation des premiers réseaux de résistance, etc.
POUR CE QUATRIÈME VOLET DE LA COLLECTION ‘La Seconde Guerre mondiale en couleur’, les photographies ont été fournies par l’agence iconographique franco-allemande AKG-images qui a procédé à une colorisation des images en noir et blanc. Loin de nuire à la compréhension de ce qui s’est passé en France entre 1940 et 1945, le procédé place le lecteur de plain-pied avec une époque qui, en raison de la distance et de la disparition des derniers témoins, lui était devenue étrangère. Un travail de fourmi qui comblera d’aise tous les passionnés d’histoires tirées de l’Histoire de la France occupée.

‘Le dernier mois’, de Léon Blum aux Espaces libres. Figure politique majeure du XXe siècle, Léon Blum -1872-1950- refusa de voter les pleins pouvoirs au maréchal Pétain en 1940, et fut emprisonné en France avant de se voir déporté en compagnie de son épouse, dans différents camps de la mort. Tous deux en réchapperont. Et Léon Blum de faire cette promesse d’écrire le récit de son premier mois d’après Buchenwald. Promesse tenue.
ÉCOUTONS-LE EN LEVER DE RIDEAU DES PREMIÈRES PAGES de cet ouvrage: ‘Un jour, j’ai promis de donner le récit de nos pérégrinations durant le mois qui s’est écoulé entre le 3 avril 1945, jour où nous avons été extraits du camp de Buchenwald, ma femme et moi, et le 4 mai de cette même année, jour où de notre fenêtre dans un hôtel perdu du Tyrol italien sur le revers des Dolomites, nous avons aperçu pour la première fois les casques américains.’
ALORS QUE LE IIIe REICH A FAIT D’EUX DES OTAGES, Jeanne et Léon Blum assistent en témoins de premier plan à la débâcle du régime nazi. Forcé de suivre le repli de l’armée allemande, le couple va découvrir Flossenbürg, Dachau puis Buchenwald, prenant de la sorte la pleine mesure de ce que fut l’horreur des camps de concentration et de leur funeste et insoutenable utilisation.
ENTRE LIBÉRATION ET LIQUIDATION, ce récit-vérité se veut celui de deux destins suspendus qu’on mène d’une prison à une autre, et qui n’ont qu’une seule peur bien au-delà de celle d’être exécutés: être séparés.
ON VOUS CONSEILLERA TOUT D’ABORD de ne surtout pas négliger la préface que signe Pascal Ory de l’Académie française. Cela fait, vous allez, via un récit d’une rare précision, mettre vos pas dans ceux de ces prisonniers politiques déportés eux aussi dans ces camps de la mort, mais où, à bien comprendre Léon Blum, leur traitement était autre que celui réservé à ces hommes et femmes porteurs de la funeste ‘étoile jaune’. Reste toutefois que pour eux aussi, la crainte journalière de l’exécution était bien présente.

‘La sage-femme d’Auschwitz’, d’Anna Stuart chez City. Anna Stuart, romancière britannique, aime s’attaquer dans ses romans aux sagas médiévales, mais aussi, et peut-être surtout, à des récits se déroulant durant la Seconde Guerre mondiale. Ce qui est le cas de ce magnifique best-seller inspiré d’une incroyable histoire vraie.
C’EST TOUT UN PAN PEU CONNU DES CAMPS DE CONCENTRATION qui nous est révélé ici. Celui des différents sorts réservés à des bébés venus au monde dans ces endroits de souffrances extrêmes et de mort. Alors, avant de vous attaquer à cette lecture aussi poignante qu’éprouvante et glaçante, je vous conseille de faire comme moi, et de vous attarder tout d’abord à ces notes historiques que l’auteure a glissées à la fin de son récit pour le moins superbement documenté.
LORSQU’ELLE ARRIVE À AUSCHWITZ SOUS UN CIEL bas et gris, Ana est persuadée qu’elle ne survivra pas à l’enfer de ce camp de la mort. Sauf qu’elle possède une compétence que les nazis recherchent grandement: celle d’être sage-femme. Son travail sera donc de donner naissance aux enfants des autres prisonnières. Une mission aussi terrible qu’effroyable, car, dès qu’ils ont poussé leur premier cri, les nouveau-nés sont arrachés à leurs mères pour être noyés, objets d’expertises ou donnés à des familles allemandes afin qu’ils soient élevés comme de vrais Aryens.
MALGRÉ LA DÉTRESSE DE CES FEMMES à qui on vole leurs bébés, Ana, bien aidée en cela par Ester, une infirmière juive enfermée de ce camp, va essayer d’apporter un peu de réconfort autour d’elle. Jusqu’au jour où elle décide de tatouer sur les bras de ces bébés, le même numéro de déportées que portent leurs mères. Une lueur d’espoir dans ce monde d’une infinie noirceur. Car un jour, après l’horreur de la guerre, grâce à ce petit geste ces enfants et leurs mères pourraient peut-être ainsi se retrouver? Un récit qui vous fera passer par des émotions de tout type. Mais toutes du style… coup de poing!

‘Adieu Birkenau’, de JDMorvan, Victor Matet, Cesc et Efa chez Albin Michel. Dans ce qu’il est convenu d’appeler ‘les devoirs de mémoire’, la BD n’est certes pas en reste. Témoin cet album consacré à Ginette Kolinka, 98 ans aujourd’hui, survivante du camp d’Auschwitz-Birkenau, et ambassadrice de son vécu et de la Shoah après des jeunes.
EN OCTOBRE 2020, GINETTE PROFITE D’UNE ACCALMIE de l’épidémie du Covid-19 pour accompagner une dernière fois un groupe à Birkenau. Pour ce voyage d’adieu, elle emmène dans ses bagages Victor Matet, journaliste à France Info, ainsi que JDMorvan, un scénariste de bande dessinée. De quoi comprendre que c’est de ce voyage, qu’est née cette BD où Ginette va nous conter sa vie. Celle d’avant le conflit. Celle où elle découvre qu’elle est juive. Celle où sa famille fuit Paris. Celle où elle et son père sont dénoncés. Celle enfin de ce camp de la mort. Tout cela sans pathos, sans rien cacher, sur le temps présent et celui du témoignage.
TOUT CE RÉCIT EST ISSU DES PAROLES DE GINETTE. Les auteurs ont tout mis en œuvre afin de conserver et d’être vigilant quant à la véracité des faits historiques. Et ce, aussi bien graphiquement que scénaristiquement. De quoi nous offrir un hommage poignant réservé à toutes les victimes de l’Holocauste. Tout cela par le biais d’un texte d’une infinie tendresse, d’une infinie justesse, admirable et sensible tout à la fois. Un texte superbement aidé par le dessin et les coloris tout en pudeur du trio Efa, Cesc et Roger.
POUR CONCLURE ET AU-DELÀ DU DOSSIER DE FIN D’ALBUM, je voudrais mettre en exergue la réponse de cette miraculée lorsqu’on lui demande ce qu’elle veut que l’on retienne de ses témoignages, elle qui a connu la souffrance jusqu’au plus profond de sa chair et qui a vu son père et son petit frère partir vers la chambre à gaz, elle a cette réponse incroyable: ‘La tolérance! Musulmans, catholiques, juifs, athées, on est tous pareils, avec un nez, une bouche et des oreilles. Ce serait formidable de s’en rendre compte pour que tout cela ne recommence pas!’ Merci, Madame!  🔵

Jan 2024

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